SHBKBLOG

HUMOUR CAUSTIQUE VS DEONTOLOGIE MEDICALE

HUMOUR CAUSTIQUE VS DEONTOLOGIE MEDICALE

Audience devant la Chambre Disciplinaire de l’Ordre des Médecins. Il est reproché à un médecin urgentiste d’avoir écrit un livre qui décrit le début de sa carrière dans un hôpital. Ce jeune praticien a multiplié les anecdotes tirées de la vie d’un service des urgences et n’a pas épargné certains de ses confrères. Il lui est reproché une infraction à l’article R 4127-31 du Code de Santé Publique qui dispose : tout médecin doit s’abstenir, même en dehors de l’exercice de sa profession, de tout acte de nature à déconsidérer celle-ci.

Le livre, intitulé « Papa pourquoi tu dors encore à l’hôpital ? » est un hommage au métier d’urgentiste et à l’hôpital, à propos duquel il écrit qu’il est « indissociable du reste de sa vie » puisqu’il occupe « la grande partie de son temps ».

L’auteur oppose des situations d’urgence parfois vitale au cours desquelles le médecin effectue des gestes d’une grande technicité à des instants de vie au cours desquels ce même médecin, s’il est fort de son savoir, est sans réponse devant le désespoir du patient. Pris dans un tourbillon de décisions, d’appréciations, d’échecs et de vies sauvées, il ronge ses angoisses à l’humour caustique.

La parole des médecins est libre, comme celle de tout citoyen, mais quelles sont ses limites ?

La loi du 29 juillet 1881 bien sûr, mais en l’espèce il n’y a ni diffamation ni injure au sens de la loi : l’auteur raconte l’envers du décor et les blagues de carabin.

Le respect du secret médical prévu à l’article R4127-4 du Code de Santé Publique, mais l’auteur y a veillé scrupuleusement.

L’article R4127-31 déjà cité sur le fondement duquel peut être sanctionné tout médecin qui « déconsidérerait » sa profession : c’était l’objet du débat.

En montrant l’envers du décor, en jugeant parfois à l’emporte-pièce, en adoptant un style parlé et expéditif, l’auteur montre que l’urgence a véritablement gagné tout son être et même son intellect. Il décrit vite et bien, et il cogne un peu. L’auteur n’est pas tendre avec ses semblables, professionnel de santé ou non, parce qu’il n’est pas tendre avec lui-même.

Mais à la fin de l’envoi il touche. Entre les lignes on lit : j’aime ce métier qui me prend tout et auquel je donne tout en râlant un peu pour la forme. J’aime les gens sans leur dire et je les soigne sans qu’ils s’en aperçoivent.

Quand ces patients se réveillent, souvent, ils ne sont plus aux urgences mais lui, et les autres, tous ces confrères qu’il charrie mais qui l’épaulent, ont été là. Ils ont tenu bon, s’échinant à faire vivre et revivre, à protéger ce fil de vie des ciseaux d’Atropos la Moire (à glace dirait-il).

Conclure à l’absence de manquement au code de déontologie n’était pas bien difficile. Quoiqu’on écrive, on ne peut pas déconsidérer une profession quand on l’aime à ce point. L’affaire a été mise en délibéré.

CONFERENCE DES AVOCATS DE L’AUTONOME DE SOLIDARITE LAIQUE

CONFERENCE DES AVOCATS DE L’AUTONOME DE SOLIDARITE LAIQUE

 

Depuis près de 30 ans, nous avons le plaisir et l’honneur de compter au nombre des « avocats-militants » de l’Autonome de Solidarité Laïque. Cette association, qui réunit 450.000 adhérents en France – entre autres tâches – conseille et assiste les membres de l’Education Nationale lorsqu’ils sont confrontés à une plainte civile ou pénale ou lorsqu’eux-mêmes, victimes de faits de violence ou de harcèlement, envisagent de saisir la justice. Nous sommes nous-mêmes à leurs côtés dans le cadre de ces procédures.

Les conditions d’exercice de la profession d’enseignant ont beaucoup changé. Disparition de la « crainte révérencielle », montée de la violence sous toutes ses formes, importance des nouvelles technologies et des réseaux sociaux : l’enseignant est désormais un professionnel exposé qui doit à la fois se faire respecter mais aussi se cramponner à une forme de neutralité stoïque – quelles que soient les agressions dont il est le sujet – car il ne peut transmettre de connaissances s’il est d’abord identifié comme autorité de police et de sanction.

Défendre est une de nos missions, une autre est de participer à la formation des enseignants : ces derniers doivent avoir une connaissance précise de leurs droits et obligations et des moyens de recours en cas d’agression physique ou verbale. L’enjeu une fois encore est de leur apporter un peu de sérénité, de diminuer leur stress de façon à leur permettre de remplir leur mission à eux : enseigner et transmettre.

Nous échangerons sur ces sujets passionnants à l’invitation du Bâtonnier Lec, avocat conseil de la Fédération des Autonomes de Solidarité Laîque.

RESPONSABILITE MEDICALE : NOUVEAUX ENJEUX

RESPONSABILITE MEDICALE : NOUVEAUX ENJEUX

Voici la « dernière-née » des conférences SHBKAVOCATS dédiée aux professionnels de santé.

Nous développons dans cette conférence trois items complémentaires, qui couvrent tous les sujets juridiques ou judiciaires susceptibles d’intéresser les médecins libéraux et salariés, généralistes ou spécialistes :

1.un point d’actualité sur la responsabilité médicale

2. un vademecum pour le traitement des situations de crise

3. une approche juridique du thème des nouvelles technologies appliquées à la médecin du quotidien,

Comme toujours, l’exposé est vivant et interactif, en prise avec l’actualité : il ne laisse personne indifférent. Chaque slide est exposé et discuté, les retours d’expérience et les questions sont traités en temps réel avec une mise en perspective pédagogique. A la fin de l’exposé de chaque thème un mini-débat est proposé par les intervenants de façon à impliquer tous les participants dans la réflexion.

Tous les détails de cette conférence dans le fichier ci-dessous..

RCMED2017

N’hésitez pas à nous contacter pour réserver (jfsegard@shbk-avocats.com): nous avons une capacité de 30 dates pour 2017 et nous assurerons cette conférence dans toute la France.

LE VOYAGE VERS NULLE PART

LE VOYAGE VERS NULLE PART

Nous défendons des étrangers dans le cadre des procédures d’expulsion. Ce sont des procédures d’urgence pour lesquelles les avocats ont moins de 24 heures pour préparer les dossiers.Le dossier est spartiate. Une audition de l’étranger : deux pages pour résumer une vie, avec quelques questions routinières et normalisées. En résulte un arrêté préfectoral reprenant moultes règles de droit et se concluant par ce qu’on pourrait résumer comme étant une obligation de quitter le territoire sans délai de départ volontaire et un placement en centre de rétention administrative. A la lecture du dossier, je comprends qu’il s’agit d’un migrant « économique ».

Il n’existe pas, dans notre droit, de « migrant économique. » Ce sont juste des étrangers en situation irrégulière. Pas de passeport, aucun droit de circulation ni de possibilité de travailler sur notre territoire national : ils sont là mais n’ont pas le droit d’être là.

Habituellement, l’étranger retenu subit la procédure et les événements comme si tout était déjà joué. C’est souvent le cas, d’ailleurs. Mais ce matin, il me regarde et je le vois. Je ne comprends rien à ce qu’il me dit. L’interprète attend qu’il ait terminé pour tout traduire. Mais cet homme, devant moi, me raconte son histoire. Son regard trahit une émotion forte.

L’interprète m’explique qu’il a quitté le Vietnam car ses parents sont trop vieux pour travailler, qu’il faut qu’il les nourrisse, qu’il a laissé sa femme et ses quatre enfants dans son pays. Il est passé par la Russie, puis a réussi à aller jusqu’en Allemagne. Pour faire ce périple, ils ont vendu tout ce qu’ils possédaient . « Je cherche un travail pour envoyer de l’argent à ma famille. Nous n’avons rien. Ils attendent tout de moi. Depuis quatre années, je ne les ai pas vus. J’ai demandé l’asile en Allemagne en 2013. Je n’ai pas encore de réponse. J’obtiens des papiers de séjour temporaire de trois mois qui sont renouvelés régulièrement. Je ne sais pas si ma demande sera acceptée… Je n’ai pas le droit de travailler avec ce papier.  C’est pour ça que je suis venu en France et que j’ai essayé d’aller en Angleterre. Je voulais voir si ça pouvait évoluer. Je veux juste aider ma famille. Aidez-moi. »

J’ai, face à moi, un homme brisé par quatre années d’errance… Quatre longues années à marcher le long des routes sans comprendre où il va. Quatre années à se cacher dans des camions qui roulent vers des destinations incertaines.

Il a formulé une demande d’asile à laquelle l’Allemagne n’a jamais répondu. Une chance. Les probabilités qu’il obtienne l’asile sont quasiment nulles au regard des règles de droit européen. Mais l’absence de réponse le protège. Il ne peut pas être renvoyé dans son pays. Les services français de police n’ont pas fait de recherches sur son statut de demandeur d’asile. La préfecture en est restée aux éléments déclarés sans les vérifier. La logique et le droit voudraient qu’il soit renvoyé vers Allemagne alors que la décision que nous contestons prévoit un retour vers le Vietnam. Une petite erreur dans le processus de décision.

Le droit administratif présente, pour les étrangers, un caractère brutal et violent car il ne prend que très peu en compte la situation personnelle des hommes.  Leur sincérité est ne sert à rien. Leur détresse ne sert à rien. Mais leur vie, c’est la vie, c’est notre vie, notre dénominateur commun, la vie putain!). Touché par cet homme qui m’accorde sa confiance, je raconte son histoire. Le juge m’écoute. Pose quelques questions. Lui aussi est touché. Cette conversation staccato, entre des personnes qui ne se comprennent que par l’intermédiaire de l’interprète, sans public, suspend le temps.

Le juge se retire pour prendre sa décision.  Je rappelle à mon client que s’il est « libéré », il n’aura pas le droit de se maintenir sur le territoire français pour autant, il lui faudra retourner en Allemagne… Il me serre les deux mains. « Il a confiance en vous » me dit l’interprète.

Le juge revient : l’arrêté préfectoral est annulé. Il sortira libre du tribunal. Dès qu’il l’apprend, il vient vers moi pour me remercier, à sa manière, en me serrant les mains à nouveau et en se courbant en signe de respect. Je suis ému et triste. Emu par cette spontanéité, sa confiance, sa joie. Triste de savoir qu’il va quitter le Tribunal sans connaître la direction de l’Allemagne, sans pouvoir se repérer dans cette ville qu’il ne connaît pas. Il est à nouveau seul, sans argent. Et moi je dois rester là, pour les autres, ceux qui suivent.

SOINS SANS CONSENTEMENT : LA PLACE DE L’AVOCAT

SOINS SANS CONSENTEMENT : LA PLACE DE L’AVOCAT

SHBKAVOCATS proposera lors de ces rencontres parisiennes un « vade-mecum » du rôle de l’avocat dans l’assistance aux patients bénéficiant de/subissant une hospitalisation sans consentement.

La prise en charge des patients psychiatriques repose sur un réseau d’établissements et de structures adaptés, au sein desquels les conditions d’hospitalisation dérogent au droit commun du consentement : il faut éviter que des patients qui ne mesurent pas toujours la gravité des troubles dont ils sont affectés puissent s’aggraver au point de devenir un danger pour eux mêmes et pour autrui.

En raison de ces troubles du comportement, de cette absence totale ou partielle de discernement, les patients peuvent subir une hospitalisation non consentie. Mais cette hospitalisation ne doit porter atteinte ni à leur liberté ni à leur dignité. C’est l’honneur d’une société que de prendre en charge ces patients en ne sacrifiant de leur liberté que la part strictement nécessaire à leur traitement.

La protection individuelle des patients contre une mesure inadaptée voir arbitraire est assurée par le respect d’un formalisme rigoureux qui préside aux mesures privatives de liberté. Le contrôle et l’intervention de l’autorité judiciaire est fondamental : il convient de réévaluer régulièrement la nécessité de cette mesure de privation de liberté.

L’avocat joue un rôle essentiel dans ce dispositif : il lui revient de soulever les moyens de légalité externe qui peuvent vicier les décisions administratives d’admission en vue de l’annulation de la mesure d’hospitalisation. 

Le contentieux de la légalité externe n’est pas toujours compris par les professionnels de santé. Il ne s’agit jamais de s’opposer à des soins légitimes, justifieraient-ils une mesure de contentieux ou d’enfermement, il s’agit par contre de veiller de façon scrupuleuse au respect des formes, elles-mêmes garantes de la légitimité du processus décisionnel qui mène à ces mesures de contention ou d’isolement.

L’avocat a donc un rôle difficile : et par une extension significative lui aussi doit respecter le primum non nocere du médecin dans cette matière spécifique. Bien défendre c’est protéger non seulement la liberté du patient mais c’est aussi vérifier qu’il n’est pas son propre ennemi.

L’avocat peut être amené à se substituer au patient-client, notamment lorsque le magistrat décide de ne pas entendre ce dernier, au vu de l’avis médical motivé prévu par la loi, spécifiant que des motifs médicaux font obstacle, dans l’intérêt de ce même patient, à son audition. C’est assez dire que l’avocat est une pièce maîtresse du dispositif et son intégrité professionnelle est absolument primordiale.

Un exemple frappant illustrera cette remarque : la Cour d’appel de Versailles a été amenée à prononcer la mainlevée d’une mesure de soins, malgré le désistement d’appel formulé directement par le patient. Son avocat avait maintenu son recours « au motif que son client lui avait confié « qu’il avait eu la promesse de sortir plus vite de l’établissement d’accueil en cas d’abandon d’appel ». Le juge d’appel a retenu que l’avocat du patient dont la présence est obligatoire « tient son mandat autant de son client que de la loi ».

Ainsi non seulement l’avocat doit s’approprier la procédure et veiller continument à l’intérêt du patient, mais encore les professionnels de santé doivent accepter ce rôle, et pour l’accepter bien le comprendre : c’est l’objectif poursuivi par cette conférence.

Plus de quatre ans après l’entrée en vigueur du texte de loi relatif aux soins psychiatriques sans consentement, il convient de faire un état des lieux, sans apriori et sans complaisance.

Maria Béatrice FONTANINI