CONTROLE T2A

UNE MISE EN DEMEURE IRREGULIERE DE LA CPAM .. ET L’INDU EST REJETE.

Le contrôle externe T2A est une suite chausse-trappes procéduraux tendus sous les pieds de chacune des parties. Dans le cours du contrôle le médecin DIM doit veiller particulièrement à ce qu’il dit et plus encore à ce qu’il écrit, dans la production des dossiers médicaux il lui est demandé exhaustivité et mémoire d’éléphant. Dans la suite du contrôle, il faut veiller à tous les délais : réponse aux observations de l’UCR, saisine de la CRA et saisine du TASS, j’en passe et des moins mûres.

Il n’est pas anormal que l’exercice tourne parfois (trop rarement encore) à l’avantage de l’établissement de soins. Par une série de 11 jugements du 3 juillet 2018, le TASS de Lille (c’est son chant du cygne puisqu’il disparait bientôt) a validé notre argumentation au soutien des intérêts d’un hôpital : la mise en demeure était nulle comme ne comportant pas la date de règlement des soins dont le remboursement était demandé .. et l’indu réclamé a été assassiné avec le chandelier dans la cuisine par le colonel Moutarde.

Le contrôle ayant porté sur les soins dispensés en 2009, aucune régularisation de la procédure n’est envisageable.

Sous réserve d’appel c’est une économie de 200.000 euros pour l’établissement.

Un petit extrait vaut mieux qu’un long discours (jugement TASS Lille 3 juillet 2018 n°2013/437). Bon c’est plutôt long comme « petit extrait » mais il n’y a rien à retirer :

     L’article R133-9-1 du CSS dispose notamment, à propos de la mise en demeure de payer l’indu, que : « …cette mise en demeure comporte la cause, la nature et le montant des sommes demeurant réclamées, la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement, le motif qui, le cas échéant, a conduit à rejeter totalement ou partiellement les observations présentées ainsi que l’existence du nouveau délai d’un mois imparti, à compter de sa réception, pour s’acquitter des sommes réclamées. Elle mentionne, en outre, l’existence et le montant de la majoration de 10 % appliquée en l’absence de paiement dans ce délai, ainsi que les voies et délais de recours (…) « .

     En l’espèce la mise en demeure de payer du 23 octobre 2012 émise par la CPAM comporte en annexe un tableau précisant pour elle-même et pour chaque organisme le numéro de dossier, le régime d’assurance maladie du patient, la caisse gestionnaire, les dates du séjour concerné, le taux de prise en charge, le GHS initial, le GHS final, le code activité, le tarif de séjour initial, les actes médicaux acceptés, les actes AMI acceptés, les actes de biologie acceptés, le forfait accepté, les montants médicaux acceptés, les montants AM acceptés  (…)

     Si le tableau renseigne précisément le centre hospitalier sur la cause de l’indu réclamé, la nature, l’étendue, le montant des sommes demeurant réclamées, il ne précise rien en revanche sur la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement, comme le requièrent les dispositions de l’article R133-9-1 susvisées.

     Il en était d’ailleurs de même au niveau de la notification d’indu du 25 février 2012, les tableaux joints étant identiques

     La caisse ne le conteste pas mais fait valoir que cette absence d’indication des dates dans les tableaux annexés résulte d’une impossibilité légale et technique, les établissements de santé financés antérieurement par dotation globale étant réglés par des dotations qui ne permettent pas d’isoler les dates de paiement des séjours.

     La caisse se fonde sur la loi de financement de la sécurité sociale du 18 décembre 2003 qui a instauré une dérogation pour les établissements de santé anciennement sous dotation globale qui ne facturent pas directement les séjours et l’activité externe à l’assurance maladie obligatoire mais qui transmettent les données d’activité à l’ARS pour valorisation.

     Ce faisant la caisse indique que, conformément à un arrêté du 23 janvier 2008, le financement des établissements anciennement sous dotation globale par la caisse est réalisé en fonction de l’arrêté mensuel du DG de l’ARS portant fixation des éléments d’activité, cet arrêté étant notifié à l’établissement concerné et à la caisse. Dès lors la date du fait générateur de l’indu donnant lieu à recouvrement ne peut pas correspondre à une facturation individualisée du séjour.

     Il s’agit uniquement de modalités de financement dans le cadre de la T2A des activités de soins des établissements de santé anciennement sous dotation globale. Ces modalités de financement dérogatoires n’ont cependant pas expressément spécifié qu’elles échappaient alors aux exigences légales et réglementaires des articles L133-4 et R133-9-1 du CSS et que l’obligation de mentionner la date des versements indus n’était pas requise.

     Or la notification d’indu et la mise en demeure sont adressées au visa expressément mentionné des articles L133-4 et R133-9-1 du CSS.

     Par un arrêt du 20 septembre 2012, la Cour de Cassation a posé que le simple fait de ne pas mentionner la ou les dates de versement de la somme indue caractérise une violation de l’article R133-9-1, peu importe que l’absence de préjudice démontré lié à cette omission et peu importe que celle-ci ne soit pas spécifiquement sanctionnée.

     Si, selon la caisse, cet arrêt a été rendu concernant un établissement de santé qui n’était pas anciennement sous dotation globale et qui ne bénéficie pas de la dérogation du système de financement, la cour de cassation sanctionne par la nullité le non-respect des dispositions de l’article R133-9-1 dont il n’est pas démontré par la caisse qu’elles ne s’appliquaient pas à la présente espèce.

     Par ailleurs, s’agissant de la prescription, la date de paiement des sommes réclamées en indu constituant le point de départ de la prescription, en l’absence de précision sur la date de paiement, l’établissement ne peut pas vérifier si les sommes qui lui sont réclamées sont ou non prescrites.

     A minima, la caisse ne produit pas davantage aux débats les dates des arrêtés mensuels du DG de l’ARS portant fixation des éléments d’activité transmis pour valorisation ni les dates de versements globaux.

     Il convient donc d’annuler la mise en demeure et la procédure de redressement ..

Il est donc important et opportun de vérifier vos procédures de contestation d’indu T2A en cours : cet argument peut être soulevé à tout moment dans le cours de la procédure, et même pour la première fois en cause d’appel.